Charles Massaux : "Je vis à 200 km/h toute l'année !"


"Vous tomberez de votre siège lorsque vous connaîtrez mon âge" lance Charles Massaux lors de notre premier entretien téléphonique. Il avait raison. Qui imaginerait que la vie de ce "pensionné" de 77 ans soit si trépidante ? Une vie où le wallon garde une place d'honneur. Entre un mensuel à rédiger et des chroniques radio à préparer, les journées de ce féru de wallon sont loin d'être de tout repos.

Nous voici dans l'antre de Charles Massaux : son bureau. "C'est ici que je passe les 90% de mon temps". Deux ordinateurs face à face plantent le décor. Matériel indispensable pour réaliser son journal: "Li Chwès" dont il est si fier. A travers les centaines de livres qui nous entourent, Charles Le Grand s'impose. Sa voix grave est pleine d'assurance. Enthousiasmé, il ne cesse de parler. Par où commencer ? Tant ses réalisations sont nombreuses. Il se montre impatient de raconter son parcours.

A l'école, Charles était bon élève mais…"J'étais chahuteur et meneur" explique-t-il. Ce qui amène son père, ancien cheminot à l'emmener sur la voie de la raison: celle du chemin de fer. "Pendant trois ans j'ai été le martyre car rien ne m'intéressait". C'est vrai. Il n'a pas l'âme d'un technicien. Il aime les lettres. Mais les débouchés de l'époque le poussent à entamer des cours d'électricité. L'homme qui mène une vie de journaliste aujourd'hui n'est pas passé loin des médias. Il passe un examen de technicien à la RTBF pour devenir caméraman. Mais son ex-femme, enseignante, le pousse à se lancer dans l'enseignement. "Et pour qu'elle me fiche la paix, j'ai introduit une demande". La passion qu'il voue à la lecture le mène à un poste de bibliothécaire durant treize ans.

Et une première blague vient se glisser dans notre conversation. "C'est l'histoire de…". Blagueur invétéré, ses plaisanteries ont souvent un rapport avec Namur, la ville qu'il chérit tant. Bon-vivant, l'humour a une place non négligeable dans sa vie. Enseignant, il racontait des blagues -en wallon bien sûr- pour énerver ses collègues qui ne les comprenaient pas. Charles participe aussi à des concours de menteurs. Et il y a brillé. Mentir en wallon ? Tout un art ! Diplômes et médailles pullulent sur le peu de place qu'il reste sur les murs de son bureau.

Il y a seize ans, son ASBL "Li Chwes" lance le premier mensuel en wallon. Auteur de la quasi-totalité de la gazette, Charles endosse à merveille le rôle de journaliste. Engagé de temps à autre pour des reportages photo, il écrit également dans des toutes boîtes namurois. Et Charles a une âme d'animateur. Depuis dix-huit ans, il se rend tous les quinze jours à Givet pour animer une émission de radio… en wallon bien sûr : Li p'tite gayole. Le dimanche, c'est sur Radio Chevauchoir qu'il anime cette même émission. Sollicité par Vivacité, il y fait des chroniques et billets d'humeur pour les amoureux du wallon.

Charles se montre actif sur tous les plans pour promouvoir notre héritage à travers le meilleur moyen selon lui : le théâtre. "Le wallon est une langue qui se parle plus qu'elle ne se lit" constate-t-il. Il organise chaque année une saison de théâtre en wallon. Et soucieux de l'avenir du dialecte, il fait également participer des jeunes depuis deux ans à un festival de théâtre wallon qui leur est spécialement dédié : le festival "Joseph Calozet". Véritable chantre du wallon namurois, il a été choisi pour traduire Tintin et les Bijoux de la Castafiore. Un véritable honneur. Boute-en-train, il s'est amusé à faire des sketchs en wallon sous le pseudonyme de li Grande Djelike.

Ses journées sont donc bien remplies. "Je suis debout vers 5h30 tous les jours et je travaille à mes occupations jusqu'environ 18h". Conscient qu'il doit quand même récupérer parce qu'il "n'est plus un jeunot", Charles n'a pas encore l'envie de se reposer sur ses lauriers. "Je n'arrête pas mais ça me plait. J'ai besoin de ça ! Si je n'avais pas ça je deviendrais fou" confie-t-il. Son regard se dirige alors sur ses médailles, suspendues au-dessus de sa tête. "Je faisais aussi partie d'une confrérie qui faisait du vin. Comme par hasard…" sourit-il. C'est certain, l'ennui n'est pas un terme qui est prêt à rentrer dans le vocabulaire de Charles Massaux... même en wallon.

Daphné Demitri